mercredi 16 octobre 2013

PIERSSENS, Michel. (1990) Savoirs à l'oeuvre. Essais d'épistémocritique. Lille: Presses universitaires de Lille.

p. 8: Un «savoir», dès lors qu'il devient texte, quand la parole le traduit, ne peut être par conséquent qu'un hybride issu d'une généalogie compliquée. Ainsi faut-il, quand il s'agit d'en comprendre les effets en littérature, en parler au pluriel: c'est à des savoirs que nous avons à faire, plutôt qu'au Savoir unique et majuscule.

p. 9: Pierssens définit les "agents de transfert" comme des "entités susceptibles d'opérer la traduction réciproque de l'épistémique en littérature et du texte en savoir. [...] Il s'agit là, on s'en doute, d'une classe fort nombreuse qui rassemble des objets et des structures qu'on pourrait croire hétéroclites: des métaphores et des chaînes de raisonnement, des simples mots isolés ou des traits descriptifs, des citations et des jeux de mots, etc."

p. 10: Au-delà des disparités, le trait commun de tous ces opérateurs de transfert, c'est bien sûr la figuralité. Ils s'offrent à la fois comme des objets «concrets» (puisqu'ils peuvent s'incarner dans des choses dont les noms sont là, dans le texte) et comme les composants d'une structure plus complexe et plus englobante, rhétorique pour l'essentiel - ce par quoi il faut entendre simplement qu'elle relève d'une logique des intensités où ce qui prime, c'est la force du discours, l'effort du texte pour convaincre.

p. 10: C'est bien en supposant au lecteur certains savoirs que le texte peut faire entendre l'inouï et jouer à la fois du désir, qui met en ruines ce qu'on sait, et de l'ordre préétabli, qui garantit la connaissance vulgaire et en légitime la naturalité. En d'autres termes: c'est le savoir qui fait la vraisemblance*. Mais puisque par ailleurs ce qui fonde celle-ci évolue sans cesse, le sujet qui s'y repère demeure toujours potentiellement déconcerté**.

*"c'est le savoir qui fait la vraisemblance": voir G. Genette "Motivation et vraisemblance" dans Figures II.

** [Note dans le texte] C'est dire aussi que le recours aux ressources des savoirs ne suffit pas à faire d'un texte un texte «réaliste», de quelque façon qu'on l'entende (le genre fantastique n'est-il pas là d'ailleurs pour nous montrer à l'évidence que savoir et fantasme font d'excellents partenaires)?

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