p. 230: Une véritable crise est ainsi ouverte. Une crise de la croyance, qui autorise à tenir la connaissance historique pour école du soupçon. Ce n'est pas seulement la crédulité qui est ici mise au pilori, mais la fiabilité de premier abord du témoignage. Crise du témoignage: c'est la manière rude de l'histoire documentaire de contribuer à la guérison de la mémoire, d'enchaîner sur le travail de remémoration et sur le travail de deuil. Mais peut-on douter de tout? N'est-ce pas dans la mesure où nous faisons confiance à tel témoignage que nous pouvons douter de tel autre? Une crise générale du témoignage est-elle supportable ou même pensable? L'histoire peut-elle rompre toutes ses amarres avec la mémoire déclarative? L'historien répondrait sans doute que l'histoire, au total, renforce le témoignage spontané par la critique du témoignage, à savoir la confrontation entre témoignages discordants, en vue de l'établissement d'un récit probable, plausible.
Paul Ricoeur. La mémoire, l'histoire, l'oubli. coll. Points - Essais, Éditions du Seuil, Paris, 2000, 689 p.
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